Mercredi 1er Octobre, 18h45. Nous avons rendez-vous au
Cinéma Étoile des Lilas avec Kilian Jornet qui présente son film Déjame Vivir
pour la toute première fois en France. Des plages d'interviews sont aménagées
pour la crème des médias course à pied. C'est un véritable honneur pour nous de faire précéder
nos questions à celles de nos modèles Greg Runner et Jean-Pierre Run Run. Si l'interview
vaut le détour, le film n'est pas en reste. Pendant une heure, Kiki et
Sébastien Montaz-Rosset régalent avec une avalanche d'images à couper le
souffle. De l'arrête du Matterhorn aux records des ascensions du Mont-Blanc, de
l'Elbrouz et du Cervin (le nom du Matterhorn en Français), ce film relate les dernières épopées du
projet Summits Of My Life. Kilian Jornet les raconte.
Bonjour Kilian, tu
présentes ton projet Summits Of My Life et ton film Déjame Vivir (que l'on
pourrait traduire par "Foutez-moi la paix"), à qui s'adresse-t-il et
quelle est ta démarche ?
C'est un film qui s'adresse je pense à tous les passionnés
de course en montagne, tous les passionnés de montagne et puis au grand public
en général. Derrière les tentatives des différents records je pense qu'il y a
une façon de voir la vie, d'essayer de trouver du plaisir et les rencontres avant-tout.
Et puis surtout une transmission. Si on en est ici aujourd'hui c'est
parce-qu'il y a eu dans le passé des gens qui nous ont inspirés, motivés donc
on est comme un maillon d'une longue chaîne et c'est essayer de transmettre ça
aussi. Je pense que Sébastien Montaz-Rosset qui a filmé et réalisé le film a très
bien réussi à retranscrire cela.
Il y a cette phrase
dans Déjame Vivir qui nous a marqué : "son but c'est pas gagner, c'est
jouer". La montagne pour toi c'est vraiment un jeu ?
La montagne c'est un jeu, c'est du plaisir. Parce-qu'à
partir du moment où on est en-dehors du plaisir, ça perd un peu de son sens.
Pour moi le travail c'est une passion aussi. C'est toujours mieux comme ça.
Donc la notion de plaisir, la notion de jeu c'est très important.
On a l'impression que
tu ne redoutes rien. Tu ne t'es jamais dit que tu repoussais les limites un peu
trop loin ?
Bon, oai si on veut
rester dans le canapé toute la journée c'est pas une vie. La vie, c'est
trouver son bonheur, c'est aussi une part de malheur, c'est aller chercher un
peu plus loin pour se dépasser. Après il faut être conscient de ses propres
limites, et sur le moment de quels sont les risques que je vais prendre. Une
fois qu'on a accepté ça, on y va.
Crédits photo : Summits Of My Life |
"Tu cours c'est plus économique. Tu ne payes pas les sherpas, tu ne payes pas le bus"
Tu as dévoré le
Mont-Blanc, absorbé le Cervin et dominé le Mont McKinley. C'est vrai que la
haute montagne c'est plus beau que la région parisienne ?
Oai c'est sûr que c'est plus beau ! La beauté c'est une
chose qui est personnelle. C'est en montagne que je me sens accueilli, c'est en
montagne que je me sens en confort. Ailleurs je ne me sens pas à ma place. À Paris je ne me sens pas chez moi. Il y
a plus de danger pour moi ici à traverser un passage piéton où je vais regarder
d'un côté mais pas faire attention au feu, ou à emprunter des routes à sens
unique, qu'en montagne. Finalement chacun a son propre environnement.
Tu ne pourrais jamais
vivre en ville par exemple ?
Ah non ! J'ai vécu pendant deux-trois années aux Houches (2
985 habitants selon Wikipédia), c'est la plus grande ville dans laquelle j'ai
jamais habité, c'était déjà assez dur.
"Le plus difficile pour le record de l'Elbrouz, c'était
de passer les frontières russes et ukrainiennes."
Tu as été dominateur
sur ultra-trail et tu t'es maintenant tourné vers l'alpinisme. Quels sont les
prochains défis que tu as en tête ?
J'aime bien la polyvalence. Faire un peu de tout : longues
distances, courtes distances, kilomètre vertical, ski, haute montagne... J'aime
bien tout mélanger. Là je vais finir la saison de course à pied avec un kilomètre
vertical en Italie. Et puis après je vais faire l'Aconcagua et d'autres sommets
et après on rattaque directement avec la saison de ski.
Donc tu combines
tout. Tu n'as pas envie de te concentrer uniquement sur une discipline ?
Non, j'aime bien changer. Ça t'apprend des choses
différentes et c'est ça qui me plaît plutôt que de me focaliser sur une seule
discipline.
On met une
demi-journée pour faire l'arrête des cosmiques. En alpinisme tu nous
ridiculises...
Les Cosmiques, à bloc
à bloc s'il n'y a personne, ça passe en une demi-heure. Mais bon, il y a
toujours du monde, donc c'est toujours difficile.
Il ne faut pas qu'on fasse
la course sur les Cosmiques alors... Par contre on s'en fait une sur 10km sur
plat ? Quel est ton record?
Je ne l'ai jamais vraiment fait. J'ai couru les 10km l'Équipe, mais je ne sais
pas le temps que j'ai fait. C'était
peut-être 34' ou un truc comme ça (38'42" en réalité), mais on filmait en
même temps, c'était la rigolade. Mais bon c'est pas mon sport, c'est
quelque chose que j'admire, que j'aime suivre, mais ce sont des capacités
différentes.
Crédits photo : Summits Of My Life |
"De toutes les expés qu'il y avait au McKinley on était la plus gitane"
Chez Jolie Foulée on
ne porte jamais rien en dessous de nos shorts quand on va courir. Qu'est-ce-que
tu emportes comme équipement quand tu
pars gravir un sommet ?
Ça dépend de chaque sommet, des conditions du jour. Tu n'as
pas forcément un équipement type parce-qu'il faut l'adapter. L'Aconcagua par
exemple c'est un sommet où au niveau technique t'as rien, donc tu peux y aller
en baskets. Mais bon après il faut voir les conditions, le niveau de froid. Si
tu prends juste un collant, ou si tu dois prendre d'autres choses. Ça dépend
des conditions météo. Si tu pars par exemple faire l'arrête des Cosmiques, même
enneigé je peux y aller en baskets, mais je mets des crampons acier devant, alu
derrière, un piolet et ça suffit. En fait pour chaque sortie il faut réfléchir,
il faut vraiment la préparer. C'est pas l'équipement de montagne d'un côté et
l'équipement de trail de l'autre, c'est penser à ce que tu dois prendre pour
chaque sortie que tu fais.
Dès que tu en as la
possibilité, tu aimes bien courir en baskets, short, tee-shirt...
Oai j'aime bien courir en étant le plus léger possible,
après plus tu as des composantes techniques et météorologiques difficiles, plus
il faut emmener de choses.
Donc c'est la
recherche de liberté qui te pousse à faire ça ?
Oai je pense. C'est simple, je n'ai pas envie de trop penser
à ce que je dois emporter, je n'ai pas envie de porter trop de poids qui ne te
permettrais pas de bouger assez vite. J'aime bien pouvoir avoir du dynamisme,
et ressentir de la liberté.
Tu as déjà fait des
tests d'aptitude physique, de VMA ? Quels sont tes résultats ?
Normalement on en fait une ou deux fois chaque année. Et
après ça dépend de l'année. La VO2 max il y a des années où je suis à 88,
d'autres où je suis à 92 ou 93. Après en vitesse je ne sais pas parce-qu'on fait toujours les tests en montée.
On ne l'a jamais fait sur plat.
Merci beaucoup pour
ta disponibilité Kilian. Pour terminer, peux-tu nous donner ta définition d'une
jolie foulée ?
Une jolie foulée ça pourrait être la foulée du recordman du
monde de marathon qui est vraiment esthétique, mais ça pourrait être aussi celle
qui t'emmène découvrir des sommets et des paysages.
Bob Tahri nous a dit "pour moi une
jolie foulée c'est une foulée qui est efficace". Lui associe ça avec la
performance. Pour toi c'est plus l'esthétisme qui compte ?
Oai. La foulée qui est belle c'est celle qui te permet d'aller dans un endroit où tu peux voir des choses.
Oai. La foulée qui est belle c'est celle qui te permet d'aller dans un endroit où tu peux voir des choses.
Crédits photo : Summits Of My Life |
Crédits photo : Summits Of My Life |
Crédits photo : Summits Of My Life |
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"Ce premier de la classe " je pense que vous avez confondu ! ;))))
RépondreSupprimerC.